RGP : l’affaire de la régie « GAZELEC »
La responsabilité de l’ordonnateur et du comptable engagée pour la non-soumission des comptes et pour l’engagement irrégulier de dépenses.
Affaire de la régie « GAZELEC » : la responsabilité de l’ordonnateur et du comptable engagée pour la non-soumission des comptes et pour l’engagement irrégulier de dépenses.
L’audience publique de la chambre du contentieux de la Cour des comptes du 16 mai 2024 examinait un cas d’engagements irréguliers de dépenses par un ordonnateur ainsi que la non-soumission des comptes et la production irrégulière de comptes par un agent comptable.
Par décision du 11 janvier 2024, le Procureur général a renvoyé devant la Cour, le Directeur ainsi que le responsable des finances et agent comptable de la régie Gazelec de Péronne (Somme), établissement public local de distribution et fourniture de gaz, d’électricité et d’assainissement. A noter dans cette affaire que seul le Directeur de la régie était présent à l’audience, l’agent comptable ayant été représenté par son avocat, ce que l’ensemble des magistrats de la Cour ont regretté.
Dans cette affaire, deux infractions sont sanctionnables par la chambre du contentieux, d’après le procureur général près la Cour des comptes :
- l’engagement d’une dépense sans en avoir le pouvoir ou sans avoir reçu délégation pour le faire (3° de l’article L 31-13 du CJF) ;
- la non-production des comptes dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État (1° de l’article L131-13 du CJF).
II est reproché au Directeur d’avoir conclu avec différentes entités trois contrats sans que ces engagements aient été expressément autorisés par délibération du conseil d’administration de la régie. D’après le parquet général, la production par la défense d’une autorisation générale autorisant la signature de tous types de contrats de fournitures ne paraît pas de nature à autoriser la signature des contrats dont il est question dans la mesure où elle ne couvre pas les contrats en cause et qu’il ne s’agit pas d’une délibération expresse du CA. Le parquet a indiqué que bien que cette irrégularité n’ait pas entraîné d’avantages injustifiés et de conséquences financières pour la régie, l’objet du régime de responsabilité financière des gestionnaires public est également de veiller au respect des formes et des compétences permettant de se prémunir de toutes dérives individuelles.
II est reproché à l’agent comptable et à l’ordonnateur de ne pas avoir produit les comptes. En effet, le compte-financier n’a pas fait l’objet de délibération du conseil d’administration pour les exercices de 2016 à 2018 et les annexes qui doivent figurer obligatoirement en appui aux documents budgétaires (notamment au budget primitif et au compte administratif) n’ont pas été produites pour les exercices de 2016 à 2019. Le CA n’étant ainsi pas en mesure d’exercer la plénitude de ses prérogatives budgétaires.
En outre, l’agent comptable aurait commis un certain nombre de manquements au code général des collectivités territoriales, remettant en cause la sincérité et la régularité des comptes présentés entre 2016 et 2019 tels que l’absence de tenue d’une comptabilité des engagements, la non reprise des résultats des exercices antérieurs dans les montants inscrits aux comptes administratifs, la production d’écritures comptables erronées et incomplètes, la mauvaise imputation de dépenses et une comptabilisation incorrecte des provisions.
C’est au regard de ces éléments que le parquet général a requis l’encontre du Directeur de la régie une amende de 8 000 € et une amende de 5 000 € à l’encontre de l’agent comptable.
Si les fautes commises par l’agent comptable n’ont pas été contestées sur le fond, sa défense a invoqué des circonstances atténuantes telles que le manque de formation et la reconduction de pratiques antérieures. La défense a également indiqué, à propos des faits reprochés, que l’agent comptable aurait agi suite aux « injonctions » du Directeur.
L’agent comptable aurait exécuté ses missions dans un climat « délicat » où il était « difficile de s’opposer à la direction sans craindre une dégradation des relations » en raison des liens de subordination existants avec elle en tant que responsable administratif financier. Une « double casquette » qui, selon la défense de l’agent. Ne lui aurait pas permis de contester un ordre direct.
La défense du Directeur a regretté, sur les fautes relatives aux comptes, qu’aucune alerte n’ait été donnée par l’agent comptable et a contesté les « injonctions » et le « climat difficile » de nature à porter atteinte à la sincérité des comptes. Par ailleurs, la défense a estimé que la production aux administrateurs d’un état détaillé des comptes accompagné d’un historique, plutôt que les comptes et ses annexes réglementaires, était un support utile et suffisant pour le conseil d’administration. Concernant la signature de contrats sans en avoir le pouvoir ou sans avoir reçu délégation, la défense a avancé l’argument selon lequel le Directeur aurait conclu des conventions en accord avec le conseil d’administration du fail que les projets avaient été présentés lors des conseils d’administration.
En conséquence, la défense du Directeur ainsi que celle de l’agent comptable ont demandé la relaxe.
Rendez-vous dans quelques semaines pour connaître le jugement de la Cour.